La marine à voile du XVIIIᵉ siècle atteint alors son véritable âge d’or, couronnement d’un savoir-faire patiemment perfectionné depuis des siècles. Les navires qui sillonnent les océans — vaisseaux de ligne, frégates, corvettes ou goélettes — représentent l’aboutissement d’une maîtrise technique remarquable. À la fois robustes, rapides et d’une élégance incontestable, ils incarnent la puissance maritime des grandes nations européennes, de la France à l’Angleterre en passant par les Provinces-Unies et l’Espagne. Chaque bâtiment est le fruit d’un équilibre délicat entre architecture navale, ingénierie, traditions maritimes et besoins stratégiques.
Ces navires se caractérisent par une coque solidement charpentée, souvent construite en chêne, capable d’endurer les tempêtes de l’Atlantique et la violence des combats en mer. Leur gréement, complexe et raffiné, repose sur un savant assemblage de mâts, vergues, haubans et voiles permettant de capter le vent sous tous les angles. Les voiles portent des noms précis : la grand-voile, la misaine et l’artimon pour les voiles principales ; les huniers, perroquets et cacatois pour les voiles hautes ; les focs et les bonnettes pour accroître la vitesse par beau temps. Ce vocabulaire témoigne d’un système rigoureux où chaque élément du gréement a sa fonction et sa place.
L’histoire de cette marine à voile est également celle d’innovations constantes. Le XVIIIᵉ siècle voit l’amélioration des plans de coque, l’adoption de gréements plus efficaces et l’évolution des tactiques navales. Les vaisseaux de ligne deviennent de véritables forteresses flottantes, organisées pour combattre en ligne de bataille, tandis que les frégates, plus légères, sont pensées pour la reconnaissance, la chasse aux corsaires ou l’escorte. Les chantiers navals perfectionnent leurs méthodes, standardisent les gabarits et développent une science de la navigation toujours plus précise grâce aux progrès dans la cartographie et les instruments marins.
À travers cet article, nous explorerons donc la composition de ces majestueux navires, la signification et le rôle de leurs voiles, ainsi que leur évolution dans le contexte d’une Europe en pleine rivalité maritime. Une plongée fascinante au cœur d’un monde où l’ingéniosité humaine et la force du vent forgent la domination des mers.
Sommaire
- La voilure d’un « trois-mâts »
- La composition d’un navire à voiles au XVIIIe siècle
- Les types de voiles
- Petit dictionnaire de la marine à voile
- Les ingénieurs de la marine au 17e et 18e siècle
- L’évolution de la marine à voile
Larguez la brigantine! Abaissez la perruche et le grand perroquet! Bordez les voiles de hunier! Les vigies à la hune! Tous à vos postes!». Aux ordres criés par le maître d’équipage, chacun se précipite à la manœuvre : nous sommes à bord d’un voilier du XVIIIe siècle.
Mais qui de nous pourrait donner l’explication de ces ordres? Ils sont trop techniques pour que d’humbles profanes de notre époque puissent les comprendre. Aussi nous reporterons-nous au petit dictionnaire des termes de marine et aux illustrations qui suivent : ils feront bientôt de nous de « Vieux loups de mer »!
La voilure d’un « trois-mâts »

- clinfoc
- grand foc
- faux foc
- trinquette
- misaine
- petit hunier fixe
- petit hunier volant
- petit perroquet fixe
- petit cacatois volant
- foc d’artimon ou voile d’étai
- grande voile
- grand hunier fixe
- grand hunier volant
- grand perroquet fixe
- grand cacatois volant
- voile barrée
- perroquet de fouge ou fixe de fouge
- perruche fixe
- cacatois de perruche
- brigantine
La composition d’un navire à voiles au XVIIIe siècle

- proue
- poupe
- beaupré
- mât de misaine
- grand mât
- mât d’artimon
- vergues
- hune
- rouf : logement de l’équipage
- cabines des officiers
- cale
La figure ci-dessus montre comment on obtenait des mâts aussi grands : plusieurs troncs de pin très droits étaient solidement raccordés les uns aux autres.
Les types de voiles

Petit dictionnaire de la marine à voile
arriver : détourner la proue de la direction du vent (c’est le contraire de lofer)
bâbord : côté gauche du navire, quand on regarde la proue
border : tendre une voile
boscot : maître d’équipage et homme de confiance du commandant
bouline : manœuvre que l’on tire pour déployer les voiles carrées au vent
brasser : orienter les vergues pour augmenter ou diminuer l’exposition des voiles au vent
carguer : replier les voiles autour des vergues
côté au vent : côté où souffle le vent
côté sous le vent : côté opposé au côté au vent
drisse : cordage servant à hisser les diverses parties du gréement
écoute : cordage attaché aux coins inférieurs d’une voile et servant à l’orienter.
enverguer : fixer une voile à sa vergue
figure de proue : figure décorative sculptée à l’avant du bateau, sous
le beaupré
filer : laisser courir un cordage
gabier : matelot chargé de la manœuvre des voiles principales (celles du hunier)
haler : tirer un cordage ou un câble
lofer : diriger la proue du côté où souffle le vent panne (mettre en) : arrêter la marche du navire point : angle d’une voile ;
tribord : côté droit du navire, quand on regarde la proue.
Les ingénieurs de la marine au 17e et 18e siècle
C’est au XVIIe siècle que l’on construisit les premiers grands bateaux à voiles. Depuis lors, la technique des constructions navales progressa parallèlement aux études des mathématiciens et des physiciens : les lois qu’ils découvrirent permirent aux ingénieurs de perfectionner leur travail.
L’immense travail de recherche accompli dans les chantiers navals d’Angleterre, d’Espagne, de Hollande, de France et d’Amérique (pays qui furent les plus grandes puissances maritimes de l’époque) permit de construire ces merveilles de solidité, de rapidité, de tonnage et même de beauté que furent les vaisseaux, clippers et goélettes des XVIII et XIXe siècles.
L’évolution de la marine à voile
3 000 mètres carrés de toile! Ce chiffre ahurissant est celui de la superficie totale des voiles exposées au vent sur les plus grands bâtiments de la fin du XVIIIe siècle. Au XVIIe siècle, on s’était préoccupé de la richesse et de la décoration des navires; dorénavant, on prend grand soin d’augmenter leurs qualités techniques : rapidité et contenance. On réduit de plus en plus les majestueux « châteaux d’avant » et « d’arrière », pour faire plus de place à la voilure et à la mâture. Les riches décorations de la poupe et de la proue diminuent jusqu’à disparaître presque complètement. La coque prend une forme plus élancée.
La voilure est enrichie, et la voile aurique remplace, sur le mat d’artimon, la voile latine. On perfectionne au maximum l’ensemble des manœuvres destinées à faire varier les dimensions et la position des voiles exposées au vent; ainsi, il est possible d’adapter la voilure aux changements atmosphériques et à la vitesse désirée.
Les bâtiments atteignent déjà, même sur les trajets les plus longs, des vitesses vraiment considérables : en 1866, trois clippers, Artel, Taiping, Serica, partis en même temps de Canton, arrivent presque simultanément à Londres, après 99 jours de traversée en contournant l’Afrique, car le canal de Suez n’existe pas encore!
Les dimensions des navires augmentent de la même façon : on construit des vaisseaux d’environ 5 000 tonneaux, et de plus de 60 mètres de long. L’un des vaisseaux de guerre les plus célèbres fut le Victory, bateau anglais qui sillonna les mers à la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe. C’était le vaisseau amiral de Nelson : longueur 50 m, largeur 18 m, hauteur (du niveau de la mer au pont le plus bas) 7 m, jauge 2 162 tonneaux: le Victory avait un équipage de 850 hommes (d’autres vaisseaux en avaient un millier) et 100 canons.
Mais les « lévriers » des mers furent, au siècle dernier, les clippers. Entre 1830 et 1870, leurs prouesses suscitèrent l’admiration des marines du monde entier, et engendrèrent une émulation presque sportive entre les diverses compagnies qui les possédaient. Chacune voulait dépasser les autres en rapidité; les clippers américains faisaient la traversée Amérique-Europe en un temps variant entre 24 et 36 jours, certains même parvinrent à faire le trajet New York-Liverpool en 13 jours et 8 heures.
FAQ
La proue
La poupe
Le HMS Victory
Dossier sur l’époque moderne
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