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Qui a gagné la bataille de Bir Hakeim ?

Bataille de Bir Hakeim

La bataille de Bir Hakeim est remportée par les forces françaises libres et plus globalement par le camp des alliés. Elle marque un retour de la France dans le concert des nations qui comptes contre les forces de l’Axe. Un homme est à la manoeuvre : Pierre Kœnig.

En été 1942, des français se retrouvent dans les sables. Bir Hakeïm. Avec presque rien, ils vont tenir la dragée haute pendant 15 jours aux forces de l’Axe presque 10 fois supérieures en nombre, mieux équipé, bien encadré et commandé par un Renard du Désert qui a déjà fait ses preuves.

Et quand les français finissent par leur fausser compagnie, c’est parce qu’ils en ont reçu l’autorisation. Et non sans percer leurs lignes, bien sûr. Jamais encore l’Axe, tout du moins l’Allemagne, n’a subit une telle humiliation.

Sommaire

Le courage et un mental d’acier peuvent donner des résultats étonnants, mais qui s’apparentent généralement dans l’univers militaire à des barouds d’honneur et autres combats désespérées.

Ici, nous avons une véritable réussite opérationnelle, avec des objectifs remplis bien au-delà de toute espérance, des pertes relativement peu élevés (il faut le mentionner) et surtout une véritable incidence sur les événements à suivre.

La bataille de Bir Hakeïm

Nous le savons tous, Bir Hakeïm n’est pas une victoire à proprement parler. Ce n’est même pas une véritable bataille. C’est un chef d’oeuvre d’intelligence tactique et d’innovations sur le terrain, le tout bien sûr porté par le courage, la détermination et l’esprit de communauté des combattants.

FFL

Rappelons brièvement que ceux-ci ont dû rompre avec leur existence, venir de parfois très loin par leurs propres moyens et souvent surmonter bien des épreuves voire dangers pour se retrouver dans un oasis perdu à défendre une cause en laquelle ils sont les seuls à croire.

Ils sont donc liés par une très forte motivation, et si on devait en faire une image d’Épinal, on pourrait dire que Bir Hakeïm et ses enjeux ont attirés les meilleures volontés dilués dans tout l’Empire.

En tout cas, ils ont dû se faire aventuriers avant d’être soldats, et ça fera toute la différence. Car les troupes de l’Axe, quoique supérieures sur tous les plans, évoluent elles dans le même cadre depuis au moins les débuts de la campagne d’Afrique, et montreront une certaine réticence à s’écarter des schémas qui lui ont jusque là assurés le succès.

Des aventuriers soldats

Elles se contenteront de frapper plus fort plutôt que de changer de modus operendi quand elles connaîtront l’échec, laissant le monopole des innovations aux français libres peu enclins à abandonner après avoir dû tant accomplir, tant traverser pour trouver enfin une occasion de représenter la France combattante.

Parce qu’ils ils comprennent bien que les standards tactiques représentent ici autant de dogmes dont il faut à tout prix sortir pour ne serait-ce qu’espérer tenir le premier choc face à des ennemis aussi nombreux sur un terrain plat qui n’offre pratiquement aucune protection.

La 1ère Brigade Française Libre à Bir Hakeim

Commençons par survoler l’unité qui encadre ces hommes d’exception : la 1ère Brigade Française Libre. Généralement considéré comme un gros régiment (+- 3000 hommes), je préfère la voir comme une micro-division. Elle est en effet bien fournie en équipement lourd comme individuel (souvent français, mais aussi issue des réserves alliées ceci étant) et est surtout capable de fonctionner de manière complètement autonome. Donc comme une division – du moins en théorie – dont le régiment peut-être vue comme un élément organique.


Du côté des hommes qui la composent, on trouve de tout : des soldats métropolitains, des coloniaux d’absolument tous horizons, des légionnaires etc… Beaucoup de spécialités sont en outre représentées. On peut aussi noter la présence de 300 républicains espagnols très bien rompus aux techniques de guérilla. On cumule un capital de compétences inédit à cette échelle.

Les clés du succès de la bataille de Bir Hakeïm

Un moral à tout épreuve

On peut aussi évoquer le capital d’expérience : sur ce point, il est très important de se figurer qu’une part assez importante de ces hommes sont des vétérans de la Campagne de France. Ils ont donc déjà combattus les allemands comme les italiens, ils ont déjà été confrontés au tandem chars – avions des premiers, connaissent leur application moderne de la doctrine de guerre de mouvement (et non pas Blitzkrieg…), et surtout, ils les ont déjà vaincus sur le terrain.

D’autres ont déjà expérimentés le combat interarme (cavalerie motorisée/infanterie portée/artillerie/aviation, le tout bien coordonnées par des transmissions efficaces) lors des opérations de pacification du Maroc ; si elles ont été couronnées de succès, ils en connaissent également les limites, notamment en ce qui concerne l’efficacité réelle de l’aviation d’appui.

Concernant l’état d’esprit général, il faut se rappeler le contexte d’alors. La défaite de la Campagne de France est pour les français libres une blessure profonde et source d’humiliation, accentuée qui plus est par les railleries des anglais dont ils dépendent – le comble. Mais il faut aussi tenir compte du simple fait que ces hommes ont dû tout abandonner, se faire parias en toute conscience de cause par un régime encore considéré pour légitime, parcourir des milliers de kilomètres et bien souvent traverser vents et marées pour rejoindre la France Libre.

Cela traduit une très forte motivation de départ prompte à transformer les moqueries et les injustices dont ils font très souvent l’objet en une farouche volonté de prouver leur valeur nourrie par une soif de revanche.

L’adaptation au terrain

S’adapter est donc primordial, et les fameux marais de mines (vraiment pour ne citer qu’eux) montrent à quel point ils ont été productifs dans ce domaine : pour compenser l’insuffisance en matériel, on revoit son utilisation.

La distance d’une mine à l’autre est inhabituellement importante – le but est d’abord de couvrir une zone aussi large que possible – créant ainsi une ceinture qui sera perçut comme dangereuse par les troupes motorisés. En effet, une fois localisé, un champs de mines dense mais plus restreint peut être contourné ou neutralisé par des sapeurs. Mais dans une ambiance de « sol piégé », un changement de trajectoire ne suffit pas à se soustraire au risque, les véhicules sont contraints de progresser avec une grande prudence et les unités de déminage ont beaucoup de mal à composer avec cette disposition particulière.

Les marais étant relativement éloignés de la zone à défendre, le ralentissement ainsi imposé à l’ennemi lui transfert logiquement une partie des difficultés du terrain du fait de la quasi-absence de couvertures naturelles.

Concrètement, les FFL ont constitués en périphérie de leurs positions une fenêtre d’exposition qui limitera momentanément la progression et les capacités opérationnelles de l’ennemi et leur permettra bien sûr de l’engager avantageusement, mais aussi de gagner le temps nécessaire pour redéployer leur dispositif et compenser dans une certaine mesure l’immense disproportion des forces en concentrant les leurs dans les secteurs attaqués.

En bref, ils se sont octroyés l’initiative d’une manière remarquable, et la conserveront tout au long des combats.

Le général Koenig contre Erwin Rommel

Notons aussi que le Général Koenig est un vétéran de la 1ère Guerre Mondiale, et cette expérience couplée à celle de la 2ème lui permettent de convenir que les meilleurs systèmes fortifiés au monde n’ont jamais eu le pouvoir d’arrèt des tranchées.

D’abord pour la simplicité de leur installation, mais surtout parce que les fortifications durs présentent des valeurs défensives certaines sur lesquelles leurs garnisons ont la fâcheuse tendance de se reposer plutôt que d’exploiter, tandis qu’elles justifient le déploiement des moyens adéquats – comprenez rares, parfois difficiles à mettre en oeuvre et souvent très importants – à leur neutralisation pour un ennemi déterminé (face à une forteresse inexpugnable, on répugne moins à utiliser, et donc exposer, les engins de siège et autres armes lourdes dont on dispose ; une pince suffit à traverser un réseau de barbelés, peu importe les risques et les morts que ça implique).

Au contraire, les simple tranchées nécessitent une défense active et maintiennent les combattants « éveillé », pour peu qu’ils soient résolus à tenir.

Et dans dans le sol rocailleux de la région, elles offrent un abri pratiquement invulnérable aux armes aveugles telles que l’aviation et l’artillerie, dont celles de l’Afrika Korps seront très actives mais sans grande efficacité car privées de leur principal élément de contact : les chars.

Forces françaises libres au combat – colorisé

En effet, le module défensif adopté par Koenig semble en retard d’une guerre et il est tenu par des effectifs presque 10X inférieurs à ceux de Rommel ( qui rappelons le a également connu la Grande Guerre), aussi ce dernier part du postulat qu’il n’est pas nécessaire d’utiliser son potentiel de combat à pleine capacité. Cela ne signifie évidemment pas qu’il n’emploiera pas du tout ses forces blindés, mais les déboires de la Division Ariete lui confirme qu’elles seront ici particulièrement vulnérable et qu’il vaut mieux les préserver au possible pour le « véritable affrontement » à venir.

Enfin, les grandes difficultés logistiques que connaissent l’AK à cette période ont également leurs poids sur cette nouvelle posture de prudence excessive du Renard du Désert.

Un choix stratégique judicieux

Bien entendu, Koenig à parfaitement interprété ces paramètres, et c’est pourquoi son dispositif ne se présente pas comme un périmètre inviolable. Ça peut sembler téméraire au vu de sa situation, mais cela suit une certaine logique. L’objectif de la 1ère BFL est de retenir au mieux le contingent principal de L’AK, et non de le vaincre – chose qui lui est impossible. Bloquer proprement l’adversaire ne ferait au pire qu’engendrer un cumul de ses forces qui finiraient par submerger les FFL, au mieux les pousseraient à contourner cette épine dans leurs pieds.

L’association d’un minage très clairsemé et de tranchées peu profondes mais solides n’a au contraire rien de décourageant pour de grandes unités interarmes. Vulgairement, on pourrait même dire que l’ennemi est « incité » à chercher le contact, seul cas de figure où les FFL peuvent se battre de manière optimale, dans un environnement de défense agressive où l’espérance de vie de l’assaillant est très inférieure à celle du défenseur.

Cette étonnante gestion de l’aspect psychologique du combat indique une hiérarchie compétente mais aussi courageuse et impliquée dans la bataille, car évaluer l’adversaire nécessite d’être sur le terrain. D’une manière générale, l’exemple d’audace, de très forte motivation et de rejet de toute forme de passivité (pourtant propres aux assiégés) que donnent les officiers -et leurs subalternes- a une répercussion très positive sur les soldats, qui les amène à se montrer eux-mêmes beaucoup plus réceptifs aux impératifs particuliers d’une situation particulière.

Leur « seuil de tolérance opérationnel » s’en trouve rehaussé, aussi, lorsque les besoins en denrées et munitions se feront sentir, ils n’hésiteront pas à aller se servir chez l’ennemi.

D’ailleurs, le fait que des troupes de l’Axe plus nombreuses soient incapables de réagir face à des FFL inférieurs mais qui agissent sur toutes les perspectives prouve bien à quel point les avantages conventionnels peuvent être en quelque sorte des entraves cognitives quand on fait face à un ennemi prompt à résilier son mode opératoire en conséquence – donc l’adapter, innover.

La résistance hors-norme de la 1ère BFL s’explique aussi par sa configuration très polyvalente. On l’a vu, le partage des compétences donne à chaque soldat la possibilité d’être au four et au moulin, et même s’il ne peut exceller partout, cela améliore énormément la cohésion de l’unité puisqu’il n’y a plus de cloisons en entre chaque spécialité. Grossièrement, elle peut se fragmenter pour diversifier ses activités sans que cela ne nuise beaucoup à sa valeur opérationnelle, parce que les mêmes effectifs peuvent se rétablir rapidement en un bloc défensif.

La compétence interarmes

Koenig, qui les commande, procède à un décloisennement des compétences : chaque corps de spécialistes n’est plus que le meilleur de sa spécialité. Un équipage anti-char perdu peut être remplacé par de l’infanterie. Un mécanicien peut se faire seconder par un servant d’artillerie. Ce partage du savoir – faire a naturellement un impact positif sur la cohésion déjà très forte de l’unité.

Dans le monde de l’entreprise, on considère que lorsque le niveau de stress est trop faible, on produit trop peu, et quand il est trop fort, on ne produit plus. Mais lorsqu’il atteint précisément le juste milieu de la courbe, on obtient des performances exceptionnelles. La 1ère Brigade Française Libre se démarque de toutes les unités de l’époque parce que tous ses soldats y sont au four et au moulin, et chacun s’oublie dans l’intérêt commun d’agir pour une cause supérieure.

Les 3 composantes essentielles d’une unité militaire – la donnée matérielle, la donnée humaine (compétences/expérience) et la donnée morale – se juxtaposent d’une manière tout à fait remarquable, et, sachant que l’évolution de chacune de ces composantes entraîne dans son sillage les deux autres, on peut conclure sans abus de langage que la 1ère Brigade Française Libre est l’une des meilleures qui ait jamais existée. Forte de toutes ces aptitudes, elle peut aussi même titre que la chevalerie en son temps sortir de sa « zone de confort », donc des dogmes qui régissent la chose militaire contemporaine, et encore une fois innover dans une situation critique pour suppléer à ce qu’il lui manque.

D’où les raids d’une audace inouïe en zone adverse pour se fournir en munitions et ravitaillement, pour ne citer que cet exemple. Ces raids représentent par ailleurs parfaitement la recherche d’une composante logistique alternative, Bir Hakeïm étant assiégée.

Mot de la fin

Toutes ces aptitudes remarquables condensées sous la bannière de la 1ère BFL expliquent comment les français parviennent contre toute attente à imposer leur volonté sur le champs de bataille, et aussi pourquoi la supériorité écrasante des troupes de l’Axe – en l’occurrence d’élites -ne peut rien y changer.

Dernier point que j’aimerais mettre en avant, il est intéressant de noter que la Brigade en elle même est plus ou moins constituée sur le tas, avec des moyens plutôt faibles et très hétéroclites, comme on le sait. Combien d’unités équivalentes aurait put former l’Afrika Korps avec ce dont elle disposait ? De même, combien auraient put voir le jour pendant la drôle de guerre, si les immenses ressources investis dans l’Opération Narvik, victorieuse mais sans lendemain, eurent été utilisés à cette fin ? On ne refait pas le monde avec des si, mais certains historiens et militaires on abordés cette question de manière extrêmement pertinente, et nous verrons peut-être cela une une prochaine fois.

Légionnaires à la bataille de Bir Hakeïm

Toujours est-il que la bataille de Bir Hakeïm reste le seul exemple d’affrontement qui voit une poignée de braves stopper purement et simplement autant d’unités motorisés, et qu’il reste sans doute nombre d’enseignements à en tirer.

Auteur : Christophe Logel

FAQ

Qui commande les FFL ?

Pierre Koenig

Qui commande l’Africa Korps

Erwin Rommel, le renard du désert

Quel avantage ont les français lors de la bataille ?

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