Opération Silver Fox ou opération Silberfuchs est une action conjointe des allemands et finlandais avec pour objectif Mourmansk. Les conditions climatiques hors normes en font un théâtre d’opération difficile pour les deux camps.
Cependant, privée de sa force motorisée, l’Axe se cassera les dents sur une défense soviétique bien organisée et libre d’actions.
Sommaire
- Contexte de l’opération Silver Fox
- Les forces de l’Axe
- Le succès soviétique de l’opération Silberfuchs
- Les allemands sur-évalués
- Conclusion de l’opération Silver Fox
De juin à juillet 1941, alors que Barbarossa pulvérise tous les Fronts de l’Armée Rouge, une guerre d’une toute autre dimension a lieu dans la lointaine Laponie.
Gebirgsjäger et gardes-frontières finlandais vont se confronter aux forces soviétiques dans un environnement aux allures irréelles sous un climat effroyable, et les dernières évolutions militaires n’y seront d’aucune aide.
Contexte de l’opération Silver Fox
Voilà près de deux ans que l’Allemagne foudroie ses ennemis les uns après les autres en Europe, rien ne semble pouvoir l’arrêter et aucun signe de redressement n’est encore visible à l’horizon. Mais dans ces combats d’un autre monde, tous les schémas semblent s’inverser et ce sont les russes qui vont infliger une défaite durable à des troupes de l’Axe pourtant mieux équipées, supérieures en nombre et plus expérimentées.
Peu remarquable comparé aux affrontements géants caractérisant une guerre en passe de devenir mondiale, cet épisode un peu oublié se démarque par une gestion tactique inhabituelle de la part des soviétiques.
Pour comprendre cette toute première victoire russe aux airs d’anomalie, il faut tenir compte des conditions effroyables dans lesquelles elle se déroule.
L’opération Silberfuchs se décline en deux assauts devant être menés conjointement :
- au nord, Platinfuchs a pour objectif la prise du port de Mourmansk ;
- au sud, Polarfuchs doit couper lignes de chemins de fer pour isoler la ville.
Les forces de l’Axe
C’est à l’Armeekorps Norwegen qu’est confié Platinfuchs. Celui-ci devra opérer au delà du cercle arctique, sous des températures extrêmes (sur les autres fronts, on se bat sous un soleil de plomb) et sur un sol parsemé de blocs rocailleux et de grands lacs.
Cette région inhospitalière est en outre pratiquement dépourvue de routes et il est bien sûr impossible d’en construire rapidement.
Devant l’impossibilité d’utiliser des véhicules motorisés, le haut-commandement allemands décide de faire acheminer des animaux de bâts pour assurer le ravitaillement. Mais ceux-ci ne survivent pas longtemps aux conditions climatiques et les hommes devront finalement porter leurs fournitures sur leur dos.
Il n’est pas très difficile d’imaginer l’impact néfaste d’un tel environnement ou tout semble hostile à l’homme sur les soldats. Le temps glacial impose un nouveau rythme de vie et les contraintes comme remettre perpétuellement en état l’équipement, faire des aller-retours entre camps et unités pour pourvoir aux besoins, chercher un endroit où passer la nuit, soigner ses gelures, allumer un feu au moindre arrêt, faire en sorte qu’eau, denrées et munitions ne gèlent pas, et tout simplement tromper le froid par n’importe quel moyen s’assimilent rapidement comme autant de mornes habitudes.
Autant dire que le moral est en berne bien avant le contact avec l’ennemi.
La situation du XXXVI. Armeekorps (Polarfuchs) n’est pas très différente. Son objectif principal, la ville de Kandalachka, se trouve au sud de Mourmansk. Si le climat y est sensiblement le même, le terrain ne l’est pas du tout. Les combattants devront évoluer dans un paysage antédiluvien composé d’épaisses forêts aux arbres gigantesques.
La désolation ambiante, la végétation spectrale et la stagnation générale seront à l’origine de cas assez nombreux de délires irrationnels parmi les soldats principalement issus des mondes rural et citadin.
De plus, la très efficace artillerie russe interdit la aussi l’utilisation des rares voies praticables.
Les troupes du Reich sont bien conscientes qu’elles ne sont pas du tout préparées à faire face à ces conditions hors normes, mais elles sont malgré tout résolues à tenter tout ce qui sera possible pour ramener la victoire sous leurs bannières.
Elles disposent néanmoins d’un atout non-négligeable : le contingent finlandais.
Les finlandais
Les soldats finlandais ont effectivement prouvés leur valeur lors de la Guerre d’Hiver, ils sont naturellement habitués aux rigueurs de l’hiver le plus terrible et le plus long d’Europe, connaissent l’ennemi et vont se battre pour une territoire qui leur revient de droit.
Tenant compte de leur insuffisance numérique et de l’obsolescence de leur équipement, ils réaliseront une fois de plus de véritables prouesses.
Mais les 2 Armeekorps se heurtent à une défense acharnée dès le début de l’attaque. Au nord comme au sud, les soviétiques sont solidement retranchés dans des positions soigneusement préparées et disposent d’une puissante artillerie.
Grâce à la mobilité exceptionnelle des gardes-frontières finlandais, L’AK Norwegen parvient à s’établir sur les premières lignes russes sans pouvoir toutefois empêcher ces derniers de se retirer en bon ordre pour renforcer les secondes.
Des troupes de marines sont également envoyés pour épauler les défenseurs et Platinfuchs s’enlisent dans des combats statiques et décousus.
Le XXXVI. AK subit lui de très lourdes pertes à peine arrivé au contact de l’ennemi. Une violente contre-attaque le renvoi définitivement sur ses positions initiales et l’envoie en renfort de la division SS « Nord » n’y change rien.
L’affaire dure moins de deux semaines et le front ne bougera plus jusqu’à la fin de la guerre. Qu’a-t-il pût se produire pour que les soviétiques systématiquement battus partout ailleurs obtiennent ici une victoire si rapide ?
Le succès soviétique de l’opération Silberfuchs
Premièrement, la perception des difficultés qu’ils partagent avec l’adversaire n’est pas la même : dans les deux camps, ce secteur est considéré comme secondaire – il est encore très difficile d’interpréter les évolutions du conflit et personne à ce moment là ne pouvait (ou ne voulait) prévoir une improbable alliance entre l’Ouest et l’Est – ce qui traduit forcément une implication moindre des commandements respectifs.
Si ce paramètre est décourageant pour les allemands habitués à se « reposer » sur un cadre pour se concentrer exclusivement sur l’action, les russes accueillent positivement cette liberté d’initiative. Affranchi de la sempiternelle ingérence de l’entité politique de l’Armée Rouge et de la crainte de représailles en cas de bavures, les officiers vont pouvoir prendre des décisions sereinement et la troupe retrouve même un certain « enthousiasme » à pouvoir enfin suivre des ordres cohérents.
Les russes ont donc toutes les cartes en mains pour organiser une défense solide. Celles-ci est organisé en profondeur, selon les instructions militaires d’avant les purges. La première ligne est relativement peu garnie en hommes, son rôle sera surtout d’évaluer les forces adverses. Pour éviter les débordements, des itinéraires de replis sont préparés jusqu’à la deuxième et ainsi de suite.
On ne cherche pas à infliger un coup d’arrêt brutal à l’ennemi, mais de lui imposer dans un premier temps un dispositif qui se durcira à mesure qu’il avance, et surtout qu’il s’épuise tout en économisant au possible ses propres forces en vue de la contre-attaque qui devra rétablir la situation.
Bien sûr, l’impossibilité de déployer aviation et grandes unités motorisés joue grandement en faveur des russes. Tout le monde doit composer avec la même pauvreté des moyens, ce qui n’a rien de vraiment inhabituel pour eux. L’ennemi ne disposant pas cette fois de la mobilité qui fait sa force, il suffira d’anticiper ses manoeuvres et concentrer ses troupes sur ses axes de progressions afin d’y obtenir une supériorité numérique locale.
Enfin, l’isolement relatif de la région préserve les soldats de l’impression de chaos général qu’engendre l’invasion allemande et n’ont pas le sentiment de mener un combat perdu d’avance.
Même les finlandais qui connaissent des débuts prometteurs ( notamment une percée de 20km en une journée, ce qui représente ici une distance considérable) finissent par réaliser que les soviétiques ont appris de leurs erreurs d’hier et doivent interrompre leur avancée.
Dernier point que j’aimerais rajouter, la surestimation de la valeur des Gebirgsjäger de la part de l’OKW. Ceux-ci ont déjà révélés certaines carences lors de la défense de Narvik.
Les allemands sur-évalués
Si leur comportement face à un ennemi très supérieur en nombre y a été admirable, ils se sont montrés en revanche incapables d’exploiter au mieux les avantages du terrain qu’ils occupent, de leur équipement adapté et de la formation spécifique qu’ils ont subit pour résister au-delà des capacités d’une troupe conventionnelle jusqu’à ce que présente une opportunité de rétablissement comme l’arrivée pourtant attendue de 15 000 hommes en renfort ou le rembarquement prévisible du corps expéditionnaire allié.
Ceci laisse transparaître d’une part un manque de projection en avant et un défaitisme prématuré d’un commandement qui manque d’audace lorsque lorsque toutes les conditions favorables à l’exécution d’une opération ne sont pas réunis, de l’autre une qualité de l’effectif qui n’est peut-être pas à la hauteur d’une unité qui se veut d’élite.
A titre de comparaison, l’esprit de corps qui unit les Fallschirmjäger leur confère un certain ascendant moral qui leur permettra de surmonter la dispersion dû au largage catastrophique ou l’absence d’appuis au sol en Crête.
Conclusion de l’opération Silver Fox
En somme toute chose, si cet échec allemand n’a rien de spectaculaire sur le moment, Mourmansk deviendra peu à peu une véritable ligne de sauvetage pour l’union soviétique : plus de 25% de l’aide matérielle alliée transitera par le port.
Il marque en outre le début des « planifications ineptes » d’une Wermacht qui confonds de plus en plus avantages ponctuels et acquis, mais prouve également que l’échelon moyen du commandement soviétique est tout à fait capable d’imposer sa volonté sur le champs de bataille lorsqu’il n’est pas bridé.
Auteur : Christophe Logel
FAQ
L’Allemagne, la Finlande et les soviétiques
Les conditions climatiques privent l’Axe des forces motorisées (aviations, blindés) d’une part. D’autre part, le commandement soviétique est libre d’action ce qui a pour effet d’améliorer le moral des troupes et d’avoir des ordres cohérents dans le cadre d’une défense en profondeur
Dossier Seconde Guerre mondiale
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